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ACTUALITÉS GEM2025-02-20

GEMExpert - Sobriété, précarité : quel impact sur l’empreinte carbone individuelle ?

Empreinte carbone

Temps de lecture : 0 min

Un comportement sobre ou une situation de précarité induisent-ils une réduction de l’empreinte carbone individuelle ? Une étude menée par Grenoble Ecole de Management apporte une réponse nuancée. La sobriété a un effet vertueux, sauf sur le chauffage des logements. Et la précarité ne réduit pas l’empreinte carbone globale des individus.

Interview de Joachim Schleich, professeur senior à Grenoble Ecole de Management (GEM)

 

Joachim SchleichQuel était votre objectif en lançant cette étude, réalisée en Allemagne auprès de plus de 1600 adultes ?

Joachim Schleich : Nous voulions vérifier le postulat selon lequel les niveaux d’empreinte carbone sont étroitement liés à la prospérité matérielle, et en conséquence, diminuent quand une situation de précarité impose des privations. Nous comptions aussi voir si les modes de vie basés sur la sobriété avaient un impact sur l’empreinte carbone.

Nous avons estimé pour chaque individu son empreinte globale et celle de quatre postes : chauffage du logement et eau chaude sanitaire, consommation d’électricité, transports et alimentation. Les ménages représentent au moins 60% des émissions mondiales de gaz à effet de serre ; pour comprendre l’influence de leur comportement, il faut segmenter.

Comment avez-vous déterminé si vos participants étaient dans la sobriété ou dans la précarité ?

JS : Afin d’évaluer leur adhésion au concept de sobriété, nous leur avons demandé s’ils étaient d’accord avec des propositions comme « je veux que mon mode de vie utilise le moins de ressources possible ». De même, la précarité était caractérisée à partir des réponses à des questions du type « à quelle fréquence avez-vous craint de ne pas pouvoir payer votre facture d’énergie ? ». Enfin, nous calculions l’empreinte carbone individuelle d’après des données sur le logement, les habitudes de transport ou d’alimentation, etc.

À quelles conclusions parvenez-vous ?

JS : Les individus portés vers la sobriété ont une empreinte carbone globale plus réduite, car plus faible pour la consommation d’électricité, les transports et l’alimentation. En revanche, nous ne constatons pas d’impact pour le chauffage et l’eau chaude sanitaire. Difficile d’expliquer ce point : notre méthode établit des corrélations, pas des causalités. On peut imaginer que ceux qui optent pour la sobriété ont des possibilités limitées pour déménager ou remplacer leur chauffage.

Chez les répondants qui subissent la précarité, les privations n’ont pas d’effet « vertueux » sur l’empreinte carbone, sauf pour le poste transports. C’est la seconde surprise de l’étude. Quand on manque de moyens, on se déplace moins, mais le reste du mode de vie ne change pas.

Que déduire de ces résultats en termes de politiques publiques ?

JS : Les comportements de sobriété doivent être encouragés. Il faut en parler dans les programmes scolaires, mener des campagnes d’information, inciter les entreprises à produire du durable et du réparable. Pour le logement, on peut promouvoir des actions simples : chauffer moins, moins longtemps et dans moins de pièces. Ou créer des tarifs d’électricité progressifs : plus on consomme, plus le prix au kWh augmente.

Enfin, les modes de transport collectifs, l’autopartage et le covoiturage doivent être soutenus. En particulier dans les zones rurales, où l’empreinte carbone des transports est plus élevée qu’en ville. En revanche, la précarité n’apporte aucun bénéfice environnemental : une raison supplémentaire de la combattre.
 

La publication académique
Abigail Alexander-Haw, Joachim Schleich, “Low carbon footprint - A consequence of free will or of poverty? The impact of sufficiency orientation and deprivation on individual carbon footprints”.

Bio express
Joachim Schleich est professeur et chercheur dans l’équipe « Management de l’énergie et de l'environnement » de Grenoble Ecole de Management. Ses recherches portent sur les domaines de l'énergie, de la politique climatique et de l'innovation. Il est également membre de la chaire Energy for Society, qui étudie la transition énergétique et l’adhésion sociale aux énergies renouvelables.

 

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Energy
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Mastère spécialisé en management et marketing de l’énergie et de la transition énergétique

 

 

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